JURISPRUDENCE DE BORDEAUX :
Construction / Vice caché / Termites / Etat parasitaire préalable à la vente / Responsabilité vendeur et du diagnostiqueur / Clause d'exonération de garantie de vice caché inapplicable
Par arrêt du 26 février 2010, la cour d'appel de Bordeaux a retenu la responsabilité solidaire du vendeur et du diagnostiqueur parasitaire pour les termites infectant une maison.
La cour rappelle qu'il appartient à l'acquéreur de prouver la mauvaise foi des vendeurs pour obtenir la réparation des désordres imputables aux vices cachés sur le fondement des articles 1643 et 1645 du code civil.
Or le constat parasitaire établit la connaissance par les vendeurs de la présence passée de termites dans leur immeuble dont ils avaient essayé de cacher les traces en posant notamment des plaques métalliques.
La cour, pour caractériser la faute des vendeurs, retient leur connaissance de l'état d'infestation de leur maison et l'absence d'indications de leurs propres constatations faites au cours des années d'occupation empêchant de délivrer à l'acquéreur une information complète et loyale sur l'état exact de l'immeuble vendu.
Elle en conclut que la connaissance de la présence de termites dans l'immeuble vendu oblige le vendeur de mauvaise foi à réparer tous les désordres imputables à ce vice. Dans ce cas, la clause d'exonération de garantie de vices cachés insérée dans l'acte de vente ne peut être opposée à l'acquéreur.
Enfin, la cour estime que la mauvaise foi des vendeurs ne saurait les exonérer de leur responsabilité en opposant l'incompétence du diagnostiqueur et ses carences dans son rapport parasitaire.
S'agissant du diagnostiqueur, la cour, par référence à l'article 6 du décret 2000-613 du 3 juillet 2000 et à la norme NF P 03-200, constate que l'expert n'avait pas procédé à l'ensemble des investigations auxquelles il était tenu.
Elle remarque aussi l'absence de mention dans le rapport du diagnostiqueur des diligences qu'il était tenu de faire et sa carence dans l'information aux parties contractantes qu'elles étaient en droit d'attendre de la part d'un professionnel.
La cour a donc retenu la responsabilité délictuelle du diagnostiqueur pour sanctionner ses fautes dans la réalisation de son constat de l'état parasitaire de l'immeuble vendu.
CA Bordeaux, 1ère chambre section B, 26 février 2010, RG 09/01531
la Cour de cassation
Dans un arrêt, la Cour de cassation rappelle une jurisprudence constante, selon laquelle l’acquéreur, qui a pu se convaincre des vices de la chose au moment de la vente ne peut, postérieurement à celle-ci, invoquer la garantie des vices cachés et l’applique au cas particulier d’un état parasitaire positif. En l’espèce, après avoir signé l’acte de vente, l’acquéreur avait constaté la présence de termites qu’il n’avait pas vus jusque-là. Il pensait être fondé à invoquer la garantie des vices cachés dans la mesure où les vendeurs avaient inexactement déclaré « avoir enlevé tous les éléments porteurs de dégradations et traité ».
Or, dès lors qu’un état parasitaire porté à sa connaissance ne laisse aucun doute sur l’infestation de la majorité des éléments en bois, l’acquéreur n’est pas fondé à invoquer la garantie des vices cachés. Le vice est apparent et ne donne lieu à aucune garantie. Eventuellement, l’acquéreur aurait pu fonder son action sur le dol. Mais dans ce cas, il lui aurait fallu prouver que sans la déclaration des vendeurs selon laquelle tous les éléments porteurs de dégradation avaient été enlevés et traités, il n’aurait pas acheté.
(Cass. Civ III : 30.1.08)
Le vendeur qui omet de signaler
Le vendeur qui omet de signaler un état parasitaire ayant révélé la présence de termites lors de son achat du bien et qui le revend deux années plus tard sans avoir effectué de traitement, même après avoir commandé un nouvel état qui s'est révélé négatif, ne peut prétendre être de bonne foi. La cour d'appel, qui a caractérisé la connaissance du vice par les vendeurs en retenant que la présence, même sans activité, de termites dans un immeuble ancien constituait un vice dès lors qu'il était acquis que, de manière très rapide, une situation caractérisée par une simple présence pouvait évoluer de manière aléatoire et non prévisible vers une véritable infestation provoquée par un regain d'activité, en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche sur l'activité des termites et les désordres en résultant que ses constatations rendaient inopérante, que la clause de non-garantie était inopposable à l'acquéreur, et a légalement justifié sa décision.
UN AVOCAT VITE !
L’achat d’un appartement peut, parfois, entraîner des mauvaises surprises notamment lorsque les acheteurs découvrent par la suite que celui-ci cache des vices.
Il est important dans ces cas-là de s’entourer des conseils d’un avocat compétent en matière de droit immobilier.
Effets de la garantie des vices cachés
L’article 1644 du Code Civil prévoit que « dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu'elle sera arbitrée par expert ».
La reconnaissance de l'existence de vices cachés peut entraîner la résolution de la vente (c'est l'action rédhibitoire), le bien est restitué et son prix est remboursé, ou permettre une réduction du prix (c'est l'action estimatoire).
La question de la clause de non garantie en matière de vices cachés
A savoir : Il existe une clause de non garantie qui peut être invoquée par le vendeur profane prévue par l'article 1643 du Code Civil qui dispose que « le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie ». Il faut naturellement que le vendeur qui entend se prévaloir d'une telle clause soit de bonne foi.
La qualité de l’acheteur
Les juges recherchent, au cas par cas, si l’acheteur était ou non en mesure de déceler le vice incriminé, c’est-à-dire s’il était ou non compétent pour le faire. Cette appréciation du caractère occulte du défaut se fait à la fois in abstracto et in concreto. Car, dans le premier cas, le tribunal va se demander si telle profession peut faire présumer telles compétences techniques, tandis que dans le second cas, il va se demander si tel acheteur déterminé pouvait légitimement ou non déceler le vice.
- Un acheteur professionnel, qui acquiert un bien dans un domaine qui est le sien, n’est pas censé connaître tous les vices de la chose du seul fait de sa qualité de professionnel. En revanche, le vendeur professionnel est traité plus sévèrement, car supporte une présomption quasi-irréfragable de la connaissance du vice. Toute clause stipulant le contraire et le déchargeant de toute responsabilité en cas de vices cachés est nulle. Toutefois, les acheteurs, professionnels ou non, devront procéder à un examen diligent de la chose, et effectuer certaines vérifications minimales.
- L’acheteur non professionnel est présumé dépourvu de compétences au regard des choses qu’il achète. Il n’a pas à effectuer des investigations approfondies ni à se faire assister par un expert chaque fois qu’il achète un bien complexe. Il doit seulement montrer une diligence minimale, impliquant un examen superficiel de la chose et des vérifications élémentaires.
Un peu de jurisprudence :
Dans un arrêt du 12 novembre 1975, la Cour de Cassation a admis qu'une clause de non-garantie stipulant que l'acquéreur prendrait l'immeuble dans son état actuel, avec tous ses vices ou défauts, apparents ou cachés, était valable, alors que la présence de termites dans l'immeuble vendu avait été découverte, au motif que la mauvaise foi des vendeurs n'avait pas été démontrée.
Tel n'est pas le cas, lorsque le vendeur est de mauvaise foi. La Cour d'Appel d'Agen dans un arrêt du 21 juin 2005 le rappelle pour une affaire similaire : la maison vendue était infestée de termites. Les vendeurs, connaissant le problème, l'avaient vendue à un non-professionnel en annexant un état parasitaire excluant la présence de termites. Le rapport d'expertise a établi l'infestation, constituant un vice caché. La clause de non-recours ne pouvait être opposée, engageant la garantie des vendeurs.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 28 mars 2007 (n° 06-12.299), a confirmé que la connaissance par les vendeurs du caractère généralisé du vice, démontrée par des renforts de solives attaquées par des insectes xylophages, empêchait l'application de la clause de non-garantie. La Cour effectue un contrôle strict de la bonne foi.
C.A. Douai (1re ch., sect. 1), 14 mai 2007 – R.G. n° 06/00422 : Les désordres affectant la charpente d'une maison, notamment la présence de mérule, découverts lors de travaux d'embellissement, constituent des vices cachés engageant la responsabilité des vendeurs, sans qu'une clause d'exonération puisse s'appliquer, ceux-ci ayant dissimulé l'état réel de la charpente sous une isolation en laine de verre.